La place des matériaux biosourcés dans la stratégie RSE des entreprises industrielles
La place des matériaux biosourcés dans la stratégie RSE des entreprises industrielles

Matériaux biosourcés et stratégie RSE : un levier clé pour l’industrie

Les matériaux biosourcés occupent désormais une place centrale dans la stratégie RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) des acteurs industriels. Dans un contexte de transition écologique, de pression réglementaire et d’attentes sociétales fortes, intégrer des matériaux renouvelables, à faible impact carbone, n’est plus un simple argument marketing. C’est un marqueur de transformation profonde des modèles de production, d’innovation et d’achats responsables.

Fibres végétales, bois certifié, bioplastiques, liants biosourcés, isolants d’origine naturelle : ces solutions s’imposent progressivement dans le bâtiment, l’emballage, l’automobile, l’agroalimentaire, la chimie ou encore la cosmétique. Pour les entreprises industrielles, l’enjeu est double : réduire leur empreinte environnementale tout en sécurisant leur compétitivité sur des marchés de plus en plus exigeants en matière de durabilité.

Définition des matériaux biosourcés et enjeux pour l’industrie

Un matériau biosourcé est un matériau produit à partir de ressources biologiques renouvelables : végétales, animales, issues de bactéries ou d’algues, ou encore de coproduits agricoles et forestiers. À la différence des matériaux d’origine fossile, ils s’inscrivent dans des cycles de carbone plus courts et, lorsqu’ils sont bien conçus, permettent de réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre.

Dans une stratégie RSE structurée, les matériaux biosourcés répondent à plusieurs enjeux majeurs :

  • Réduction de l’empreinte carbone des produits et des procédés industriels
  • Diminution de la dépendance aux ressources fossiles et aux marchés pétroliers instables
  • Création de nouvelles chaînes de valeur locales, agricoles et forestières
  • Amélioration de l’image de marque et de la différenciation commerciale
  • Conformité avec les réglementations environnementales actuelles et futures

Les matériaux biosourcés deviennent ainsi un outil structurant de la politique développement durable d’une entreprise, au même titre que l’efficacité énergétique, l’économie circulaire ou l’écoconception des produits.

Matériaux biosourcés et réduction de l’empreinte carbone

Le premier bénéfice mis en avant dans les stratégies RSE est la réduction de l’empreinte carbone. De nombreux matériaux biosourcés stockent du carbone tout au long de leur croissance (plantes, bois, fibres naturelles). Utilisés dans des produits à longue durée de vie, ils permettent de “piéger” ce carbone et de diminuer l’impact global du cycle de vie.

Les analyses de cycle de vie (ACV) montrent, par exemple, que le remplacement de certains plastiques d’origine fossile par des biopolymères issus d’amidon, de sucre ou d’huiles végétales peut réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre, à condition d’optimiser les pratiques agricoles et la fin de vie du produit. Dans le bâtiment, le recours à des isolants biosourcés (laine de bois, ouate de cellulose, chanvre, lin, laine de mouton) permet non seulement une bonne performance thermique, mais aussi une réduction des impacts environnementaux par rapport à certains isolants conventionnels.

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Pour intégrer efficacement les matériaux biosourcés dans une stratégie climat, les entreprises industrielles doivent :

  • Mesurer l’empreinte carbone de leurs produits de référence
  • Comparer les scénarios de substitution avec des solutions biosourcées
  • Intégrer l’approche ACV dans la conception et la sélection des matériaux
  • Communiquer de manière transparente sur les gains réels, sans “greenwashing”

Contribution aux objectifs RSE : environnement, social et gouvernance

La place des matériaux biosourcés dans la RSE ne se limite pas au volet environnemental. Leur utilisation peut également répondre aux dimensions sociale et économique de la durabilité, ainsi qu’aux enjeux de gouvernance.

Sur le plan environnemental, les matériaux biosourcés contribuent à :

  • La réduction des déchets et l’amélioration de la recyclabilité des produits
  • L’intégration dans des modèles d’économie circulaire (réutilisation de coproduits, valorisation de biomasse)
  • La préservation de certaines ressources non renouvelables

Au niveau social et territorial, le développement de filières biosourcées favorise :

  • La création d’emplois locaux dans l’agriculture, la sylviculture, la transformation et la logistique
  • La diversification des revenus des exploitations agricoles et forestières
  • Le renforcement des partenariats entre industriels, agriculteurs, coopératives et collectivités

Enfin, en termes de gouvernance, intégrer les matériaux biosourcés impose aux entreprises industrielles de :

  • Mettre en place des politiques d’achats responsables et de traçabilité
  • Dialoguer avec les parties prenantes locales (filières, ONG, pouvoirs publics)
  • Se doter d’objectifs clairs et mesurables sur l’incorporation de matières biosourcées

Secteurs industriels en pointe sur les matériaux biosourcés

Tous les secteurs industriels ne sont pas au même niveau de maturité. Certains ont déjà engagé des stratégies avancées de substitution de matières premières.

Dans le secteur du bâtiment et de la construction, les matériaux biosourcés sont de plus en plus présents dans :

  • Les isolants thermiques et acoustiques (chanvre, cellulose, lin, liège, fibres de bois)
  • Les panneaux dérivés du bois et les ossatures bois pour les bâtiments à faible impact carbone
  • Les mortiers et bétons allégés intégrant des granulats végétaux (chanvre, miscanthus)
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L’industrie de l’emballage et du packaging explore également de nombreuses alternatives biosourcées :

  • Bioplastiques compostables pour l’agroalimentaire et la restauration
  • Emballages en papier et carton recyclables renforcés par des fibres naturelles
  • Solutions d’emballage réutilisables combinant matériaux biosourcés et éco-conception

D’autres secteurs, comme l’automobile (pièces intérieures en fibres naturelles), la cosmétique (flaconnages partiellement biosourcés), la chimie (solvants verts, tensioactifs d’origine végétale) ou le textile technique (fibres végétales, biopolymères) avancent également rapidement, portés par la pression des donneurs d’ordre et des consommateurs.

Intégrer les matériaux biosourcés dans une politique d’achats responsables

Pour une entreprise industrielle, la montée en puissance des matériaux biosourcés passe nécessairement par une politique d’achats responsables structurée. Cela implique de revoir en profondeur les critères de sélection des fournisseurs et des matières premières.

Les directions achats et les responsables RSE doivent, par exemple, intégrer les éléments suivants :

  • Taux de matière biosourcée dans les produits proposés
  • Traçabilité des ressources (origine géographique, certifications, labels)
  • Certifications environnementales (FSC, PEFC, labels bio, écolabels)
  • Conditions sociales de production dans les filières agricoles et forestières
  • Impacts sur la biodiversité et l’usage des sols

Cette approche achats responsables favorise l’émergence de partenariats de long terme avec des fournisseurs engagés dans la bioéconomie, garantissant qualité, stabilité des approvisionnements et innovation conjointe.

Limites, risques et points de vigilance pour les entreprises industrielles

Si les matériaux biosourcés offrent de réelles opportunités pour la RSE, ils ne sont pas exempts de limites ni de risques. Une intégration responsable suppose une analyse fine des impacts et des arbitrages.

Parmi les principaux points de vigilance, on peut citer :

  • La compétition possible entre usages alimentaires et non alimentaires de certaines cultures
  • Les risques de déforestation ou de dégradation des écosystèmes si les approvisionnements ne sont pas certifiés
  • La variabilité de la qualité de certaines matières premières naturelles
  • Le manque de standardisation technique sur certains matériaux émergents
  • Les surcoûts initiaux liés à l’innovation et à la montée en échelle industrielle

Pour éviter les effets pervers, il est essentiel de :

  • Réaliser des analyses de cycle de vie complètes, incluant l’usage des sols et la biodiversité
  • Privilégier des matières premières issues de coproduits, de déchets organiques ou de cultures à faible intrant
  • S’appuyer sur des labels et certifications reconnus pour sécuriser les approvisionnements
  • Associer les parties prenantes (filières agricoles, ONG, territoires) dès la phase de conception
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Mettre en place une feuille de route RSE centrée sur les matériaux biosourcés

Pour que les matériaux biosourcés prennent une place structurante dans la stratégie RSE, une démarche organisée et progressive est nécessaire. Les entreprises industrielles peuvent s’appuyer sur quelques étapes clés.

  • Diagnostic initial : cartographie des matières premières utilisées, analyse de l’empreinte carbone et des impacts environnementaux, identification des gisements de substitution potentiels.
  • Définition d’objectifs : fixation de cibles chiffrées d’incorporation de matériaux biosourcés par gamme de produits ou par site de production, intégrées dans la politique RSE globale.
  • Innovation et R&D : développement de nouveaux produits, tests industriels, collaboration avec des start-up, centres techniques, pôles de compétitivité dédiés à la bioéconomie.
  • Montée en puissance des filières : sécurisation des approvisionnements, contractualisation avec les producteurs, soutien à des projets territoriaux de production et de transformation.
  • Formation et acculturation : sensibilisation des équipes internes (achats, R&D, production, marketing) aux enjeux des matériaux biosourcés et de la transition écologique.
  • Communication responsable : transparence sur les progrès, publication d’indicateurs clés, mise en avant des bénéfices environnementaux réels sans exagération.

Cette feuille de route permet de faire des matériaux biosourcés un véritable pilier de la transition environnementale de l’entreprise, en cohérence avec ses engagements RSE et ses objectifs de performance globale.

Vers une bioéconomie industrielle au cœur des stratégies RSE

L’essor des matériaux biosourcés s’inscrit dans une dynamique plus large de bioéconomie, qui vise à créer de la valeur à partir de ressources biologiques renouvelables. Pour les entreprises industrielles, il ne s’agit plus seulement de substituer un matériau par un autre, mais de repenser l’ensemble de leur modèle autour de cycles de matière plus vertueux.

Les stratégies RSE les plus avancées intègrent déjà ce changement de paradigme : développement de produits bas carbone, conception pour la recyclabilité et la réparabilité, proximité avec les territoires de production de biomasse, collaboration étroite avec les acteurs de la recherche en biotechnologies et en sciences des matériaux.

Les industriels qui anticipent et investissent dans les matériaux biosourcés renforcent leur résilience face aux tensions sur les ressources fossiles, mais aussi leur attractivité auprès des clients, des talents et des investisseurs sensibles aux enjeux ESG (Environnement, Social, Gouvernance). Ils préparent ainsi l’avenir d’une industrie plus responsable, ancrée dans son territoire et compatible avec les limites planétaires.

By Doriane